vendredi 20 juin 2014

Le Domaine de la Philosophie de la Religion et sa Portée




L’exploration  philosophique des croyances religieuses et des pratiques est évidente dans la philosophie connue la plus ancienne, en Occident et en Orient. En Occident, dans toute la philosophie gréco-romaine et à l’époque médiévale, la réflexion philosophique  sur  Dieu, ou les dieux, la raison et la foi, l’âme, la vie après la mort, etc.  n’était pas considérée comme étant  une sous-discipline appelée « philosophie de la religion ». La philosophie du divin était tout simplement un élément parmi  plusieurs projets philosophiques  imbriqués. Cette interpénétration de la recherche  philosophique avec des thèmes religieux et des entreprises philosophiques plus large (par exemple, la théorie politique, l’épistémologie, etc.) est manifestée chez plusieurs philosophes modernes tels que John Locke et George Berkeley. Ce n’est que progressivement que nous découvrons des textes exclusivement consacrés à des thèmes religieux. La première utilisation du terme « philosophie de la religion » en anglais date du XVIIe siècle dans les œuvres de Ralph Cudworth. Cudworth et son collègue de l’Université de Cambridge, Henry Moore, ont écrit des œuvres philosophiques avec une attention particulière  sur la religion, et ainsi, si l’on  insistait pour dater le commencement de la philosophie de la religion en tant que  domaine, il y a de  bonne raisons pour  pretendre  qu’il a commencé (progressivement) au milieu  du XVIIe siècle.

Aujourd’hui, la philosophie de la religion est un solide domaine  intensivement  actif de la philosophie. Presque sans exception, l’introduction à la philosophie dans le monde anglophone comprend  la philosophie de la religion. L’importance de la philosophie de la religion est principalement due à l’objet : les diverses croyances en Dieu, Brahman, et le sacré, la variété des expériences religieuses, l’interaction entre la science et la religion, le défi des philosophies  non-religieuses, la nature  et la portée du bien et du mal, le traitement religieux  de la naissance, de l’histoire et de la mort, et d’autres questions substantielles . Une  exploration philosophique de ces thèmes  implique des questions  fondamentales concernant  notre  place dans le monde et notre relation à ce qui peut transcender le monde. Un  tel travail philosophique  exige  une  enquête  sur la nature de la pensée humaine et ses limites. A côté de ces projets complexes, ambitieux, la philosophie de la religion a  au moins trois facteurs qui contribuent à son importance pour l’entreprise  globale de la philosophie.

La philosophie de la religion explore des pratiques personnelles et socialement ancrées. La philosophie de la religion est donc  pertinente pour des préoccupations pratiques ; son sujet n’est pas du tout une théorie abstraite. Etant donné le pourcentage important de la population mondiale qui est ou bien religieuse ou bien affectée  par la religion, la philosophie de la religion a un rôle assuré pour aborder les valeurs et les engagements des personnes. Un  référentiel  important dans beaucoup de philosophie  de la religion est la forme et contenu  des traditions vivantes. Ainsi, la philosophie de la religion peut être informée par les autres disciplines qui étudient la vie religieuse.

Une autre raison expliquant l’importance de ce domaine  est son étendue. Il y a peu de domaines  de la philosophie qui soient dépourvus d’implications  religieuses. Les traditions religieuses sont tellement complètes et englobantes  dans leurs affirmations que presque tous les domaines de la philosophie peuvent être puisés dans l’investigation philosophique de leur cohérence, de  leur justification et de leur valeur.
Une troisième raison est d’ordre historique. La plupart des philosophes à travers l’histoire des idées, en Occident et en Orient, ont traité des  thèmes religieux. On ne peut pas entreprendre  une histoire crédible de la philosophie, sans prendre la philosophie  de la religion au sérieux.

Bien que  ce domaine soit vital pour la philosophie, la philosophie de la religion peut également apporter  une contribution essentielle aux études  religieuses et théologiques. Les études religieuses impliquent souvent des hypothèses méthodologiques  importantes  sur l’histoire, et sur la nature  et les limites de l’expérience  religieuse. Celles-ci  invitent  l’examen  philosophique  et le débat. La théologie peut  également retirer  des bénéfices de la philosophie de la religion dans au moins deux domaines. Historiquement, la théologie a souvent été  influencée  par, ou tirée de la philosophie. Le platonisme et l’aristotélisme  ont eu une influence  majeure sur l’articulation de la doctrine chrétienne  classique, et à l’époque moderne les théologiens se sont inspirés des travaux des philosophes (de Hegel à Heidegger et Derrida). Un autre  avantage réside dans les tâches philosophiques de clarification, d’évaluation et de comparaison des croyances religieuses. L’évaluation a parfois été très critique et peu conciliante, mais il y a des périodes d’abondance dans l’histoire des idées où la philosophie a positivement contribué à l’épanouissement de la vie religieuse. Cette interaction constructive ne se limite pas à l’Occident. Le rôle de la philosophie sur les différents points de vue  bouddhistes  sur la connaissance et le soi ont été d’une  grande importance. De même que les idées philosophiques ont nourri  le travail théologique, les grands thèmes de la théologie impliquant la transcendance de Dieu, les attributs divins, la providence, etc., ont eu des impacts substantiels sur des projets philosophiques importants. (Hilary Putnam, par exemple, a lié la philosophie de la vérité au concept de point de vue de l’œil de Dieu).
Au début du XXIe siècle, une raison plus générale peut être citée en faveur de la philosophie de la religion: elle peut renforcer le dialogue interculturel. Les philosophes de la religion sont aujourd’hui souvent à la recherche  de  points communs, ainsi que des aspects spécifiques aux croyances et pratiques religieuses. Cette étude peut favoriser la communication entre les traditions, les religions et  les institutions séculaires.

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